digital art - Paris Berkeley 2002-2006
Demiaux Richardson Prado Vesna Bret Martinez Matos Stelarc Ascott Venturelli Murakami Maeda

 

Luc Martinez




POINT DE VUE

 

Matière sonore

 

Il est difficile de parler de création musicale aujourd’hui sans évoquer la formidable diversité des publics et des nouveaux modes d’écoute… Bien entendu, la musique “à entendre“ à la maison ou dans une salle de concert continue de se développer, mais il existe aujourd’hui de très nombreuses situations de rencontre avec le son où tous les archétypes  de l’écoute sont heureusement détournés : notion d’œuvre, de composition linéaire, classification entre bruit, son et musique, lieux de diffusion, reproduction immuable du rapport frontal à la scène, rituel du concert quel qu’en soit le style… 

 

Luc Martinez préfère explorer des situations expérimentales où le son se déplace, étonne, interagit avec son environnement naturel ou urbain ou directement avec son auditeur, actif ou passif…  Son travail fait appel à la création électroacoustique, à l’acoustique fondamentale, aux techniques de diffusion sonores innovantes, à l’informatique et l’électronique interactive, aux transmissions par réseau à large débit comme à la scénographie…

 

Dans ses installations sonores il expérimente non seulement la géographie acoustique d’un lieu, mais aussi sa nature. Transmission du son par l’eau, le bois, le verre, le métal… Il explore également le “trompe-l’oreille“ comme on le fait de l’illusion d’optique, grâce notamment à la psycho-acoustique…

 

 

 

 

VISITE D’ATELIER

Compositeur, concepteur sonore et multimédia, musique électroacoustique, Luc Martinez se spécialise dans les concerts-live sur réseau Haut Débit entre musiciens distants, avec liaison vidéo et musicale (audio et Midi). Ses recherches portent sur la communication distante et sur les nouveaux territoires de la création musicale en réseau.

• Luc, qu'est ce que la musique en réseau ?

J’explore depuis 1991 la transmission en temps réel entre sites distants, sans décalage temporel en qualité numérique, avec le support de la vidéo. J’utilise des réseaux spécialisés qui ne fonctionnent pas sur internet, norme IP asymétrique et encore trop lente, quel que soit le débit en jeu.

Je concentre ces expérimentations sur la recherche de nouveaux territoires de création qui ne peuvent exister que grâce à l’usage du réseau… boucles d’improvisation et de traitements, acoustiques transplantées, mise en réseau de sites naturels… Ceci induit un rapport nouveau entre les musiciens, et avec le public… il y a encore tout à inventer. 

• Peux tu nous parler de la "spatialisation" et de ta conception de la matière sonore?

La matière sonore constitue ma palette de travail dont les sons “musicaux“ ne sont que des cas particuliers, des coïncidences que je n’exclue pas à priori. Cette comparaison du son à la matière vient tout simplement du fait qu’en dehors des termes techniques hérités du conservatoire, on s’est vite aperçu qu’on n’avait pas de mots pour décrire la peau d’un son… on a donc emprunté le vocabulaire à d’autres sens comme la vue ou le toucher ; on parle volontiers d’un son mat ou brillant, lisse, velouté ou rugueux…

La spatialisation profite aussi de cette liberté retrouvée du son face à la musique. Essentiellement instrumentale, la musique à toujours induit voire imposé le rapport frontal à la scène, réelle ou virtuelle, ce qui fait qu’un être normal conçu pour entendre à 360° continue d’écouter de la musique sur une ou deux boîtes situées face à lui…

Seuls les électro acousticiens, affranchis de la note, ou les artistes et plasticiens sensibles à la notion d’installation cherchent à déployer la source des sons dans un espace tridimensionnel.

• Quelles sont les oeuvres que tu as réalisées à partir de ce concept ?

J’ai créé un concert-installation pour 8 haut-parleurs spatialisés par des parapentes en vol stationnaire (soaring) à quelques mètres au-dessus du public. Une performance d’une heure a été réalisée sur une plage du Portugal.

Ma dernière installation sonore “ le Puits “ se déroule entièrement dans le noir.

Le noir complet de la pièce permet de redéfinir par le son (une couronne de haut-parleurs) le lieu de l’installation. Ces sons sont composés en studio et spatialisés à partir de prises de sons originales retraitées.

Le puits installé au centre de l’espace (véritable cylindre d’un mètre de haut) est à peine visible. On n’en distingue la profondeur 23m que par l’acoustique particulière restituée.

Certains sons ou paroles émis par le visiteur sont samplés en temps réel par un patch Max MSP, accumulés dans une banque et renvoyés aléatoirement depuis le fond du puits après chaque intervention. Des dialogues surréalistes naissent ainsi entre les visiteurs, présents ou passés…

Enfin, si l’on se risque à sonder le trou avec la main, un capteur Infra rouge tire au hasard un son préparé (une soixante disponible) venant toujours du fond…

• Quels sont tes projets actuels ?

Je prépare la mise en réseau haut-débit multimédia des 12 grands ports historiques de la méditerranée, sous forme d’une grande installation panoramique à Marseille pour 2005.